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HOMÉLIE DOMINICALE

(Homélie du Père Yvon-Michel Allard, s.v.d., directeur du Centre biblique des Missionnaires du Verbe Divin, Granby, QC, Canada.)

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Sa famille, vint pour se saisir de lui, car ils affirmaient : «Il a perdu la tête.»

 Au début de sa prédication, Jésus a eu du succès. La «foule», c’est-à-dire les gens du petit peuple, se pressaient autour de lui pour l’écouter. Marc, qui tient ses renseignements de Pierre, note qu’un jour il y avait tant de monde qu’on n’avait même plus de la place pour manger. Cette maison où Jésus se trouve est sans doute celle de Simon-Pierre, à Capharnaum, que Jésus avait adoptée comme la sienne. Dans les ruines actuelles de la ville de Capharnaum, les archéologues ont retrouvé la base d’une modeste maison de pêcheurs datant du ler siècle avant J.-C. sur laquelle avait été édifié un très ancien sanctuaire chrétien. Les graffitis de dévotions marqués dans les plâtres suggèrent qu’on aurait retrouvé cette «maison» où Jésus a souvent résidé.

C’est pendant que Jésus prêchait dans la maison de Pierre que les membres de sa famille sont venus pour le ramener chez-lui, à Nazareth. Sa famille disait : «Il est devenu fou… il a perdu la tête…» La famille de Jésus ne pouvait pas ignorer qu’il était «mal vu» des autorités religieuses… Ces autorités disaient non seulement qu’il était fou, mais qu’il était possédé et tenait son pouvoir de Satan. Marc a emboîté l’un dans l’autre l’épisode du «refus des scribes», et celui de la démarche de sa famille. Jésus est rejeté, méconnu… même par sa propre famille. Par deux fois, Marc note que la famille de Jésus «est dehors». Cette expression «ceux du dehors» est habituelle, dans l’Église des premiers siècles, pour désigner les «non-chrétiens». La scène, où Marie et la famille de Jésus viennent pour essayer d’arrêter la mission de Jésus, doit nous faire longuement méditer sur ce qu’est la foi. La foi de Marie, pas plus que la nôtre, n’est «toute-faite», une fois pour toutes. La foi ne peut se définir que comme une réalité qui évolue. Ce n’est pas dès le premier instant de l’Annonciation que Marie a compris qui était son fils. Luc, lui aussi, a noté que Marie, à certaines occasions, n’a «pas compris» Jésus. Exemple lorsqu’à douze ans il est resté dans le Temple, «la maison de son Père».

La famille de Jésus ne le reconnaissait plus depuis sa conversion, depuis qu’il avait quitté sa vie tranquille de Nazareth, pour se convertir en prédicateur ambulant. Sa famille savait parfaitement qu’il était mal vu des autorités, des scribes venus de la capitale, Jérusalem. «Il va nous faire attraper des histoires… allons, ramenons-le à la raison… réduisons-le à être comme tout le monde. Il est fou de se distinguer

Les scribes sont spécialement descendus de Jérusalem pour s’enquérir de lui, ce jeune Rabbi qui fait tourner la tête au peuple. Leur diagnostic est encore plus cruel que celui de sa famille. Jésus est pire qu’un simple d’esprit. Il est possédé par un démon impur, il est un suppôt de Satan.

Qu’a donc fait Jésus pour être considéré comme un suppôt de Satan ? Il annonçait que Dieu était venu parmi nous, qu’il libérait des possédés, guérissait des malades, s’approchait des lépreux et osait même les toucher pour leur rendre la santé. Il allait jusqu’à pardonner les péchés, il mangeait chez des gens de mauvaise conduite. Il prenait des libertés avec l’observance du sabbat. Il disait qu’il fallait mettre le vin nou­veau dans des outres neuves ! En somme, la subversion totale des traditions de son temps, et tout cela en se réclamant de Dieu !

Au temps de Jésus, la famille était sacrée. Ici, Jésus opère une rupture et déclare qu’il existe une autre famille plus forte que celle du sang, ouverte à toute humanité. Jésus se distancie de sa propre famille en utilisant une phrase choc : «Voici ma mère et mes frères. Celui qui fait la volonté de Dieu, celui-là est mon frère, ma sœur, ma mère.» Et ensuite Jésus ajoute : «Amen, je vous le dis, Dieu pardonnera tout aux enfants des hommes, tous les péchés et les blasphèmes qu’ils auront faits. Mais si quelqu’un blasphème contre l’Esprit Saint, il n’obtiendra jamais le pardon. Il est coupable d’un péché pour toujours.» La première partie de la phrase ne nous étonne pas. Nous sommes persuadés que Dieu pardonne toujours. La miséricorde de Dieu est sans limite. Mais Jésus affirme qu’il existe un péché impardonnable: ce qu’il appelle le blasphème contre l’Esprit. Là encore, on croit entendre saint Jean : «Il est venu chez lui et les siens ne l’ont pas reçu… Mais à ceux qui l’ont reçu, à ceux qui croient en son nom, il a donné le pouvoir de devenir enfants de Dieu» (Jn 1). Dieu ne peut pardonner à ceux et celles qui refusent d’être pardonnés.



HOMELIE DOMINICALE

( Homelie du Père Yvon-Michel Allard, s.v.d., directeur du Centre biblique des Missionnaires du Verbe Divin, Granby, QC, Canada.)

« Ceci est mon sang, le sang de l’Alliance, répandu pour vous »

À la fin du cycle pascal et avant de reprendre le «temps ordinaire», la liturgie nous propose trois grandes fêtes qui célèbrent notre Dieu : la Pentecôte, fête de l’Esprit Saint, la Trinité qui révèle toute la richesse de Dieu, et la fête du Corps et du Sang du Christ, qui met l’accent sur le Dieu incarné, le Dieu-avec-nous : «Voici que je suis avec vous jusqu’à la fin des temps» (Mt 28, 20).

La fête de l’eucharistie, que l’on appelait autrefois la Fête-Dieu, est la célébration de l’alliance entre Dieu et nous. Il y a quelques années, nous aimions souligner cette alliance par une procession à travers les rues de nos villes et villages. Nous voulions affirmer notre foi au grand jour. Aujourd’hui, nous célébrons de façon plus simple et plus intérieure. Depuis plus de sept siècles, la Fête-Dieu souligne la présence du Seigneur parmi nous. Sainte Juliane de Liège, une religieuse de l’ordre de S. Augustin, en a été l’instigatrice et le Pape Urbain IV a demandé à saint Thomas d’Aquin de préparer une messe spéciale pour cette fête. Au 13e siècle, Thomas a écrit le Tantum Ergo et le O Salutaris Ostia. Ces hymnes d’une grande beauté reviennent de temps à autre dans nos liturgies.

L’histoire de la Bible est l’histoire de Dieu qui cherche à faire une alliance avec son peuple : avec Noé, après le déluge, avec Abraham son ami et avec Moïse, le libérateur. Plus tard, les prophètes annoncent une nouvelle alliance personnelle avec chacune et chacun de nous, alliance qui se réalisera en Jésus-Christ, le Dieu-avec-nous.

Lorsque le Christ a célébré la Pâque, il n’avait pas autour de lui des gens parfaits. Il y avait là Pierre, Judas, Jean et les autres apôtres. Le Seigneur connaissait leurs faiblesses. Il était habitué à manger avec les publicains et des pécheurs, il fréquentait les prostituées, les collecteurs d’impôts, les gens simples qui avaient confiance en lui. Même dans l’atmosphère solennelle de la chambre haute, même dans le cercle restreint des douze apôtres, on peut entendre la question : «Pourquoi mange-t-il avec des pécheurs?» L’eucharistie est le souvenir de ces repas du Christ avec ses amis, avec celles et ceux qui comptaient sur lui et qui trouvaient en lui leur salut.

Le Nouveau Testament nous offre quatre récits de l’institution de l’eucharistie : les récits de Marc, de Luc, de Matthieu et de Paul. Jean remplace l’institution de l’eucharistie par le lavement des pieds. Les quatre récits sont d’accord sur l’essentiel, mais ils nous présentent des formules un peu différentes prononcées par Jésus. Il est important de souligner ce fait, pour nous délivrer d’une conception trop «rituelle» des sacrements, comme si Dieu était lié à des mots précis, comme c’est le cas dans les formules magiques.

Il est évident qu’aucun des quatre récits ne raconte tout ce que Jésus a fait au cours de son dernier repas. En fait, on ne connait pas les paroles exactes prononcées par Jésus le soir du jeudi saint. Nous sommes en présence de textes liturgiques qui nous rapportent comment les premières communautés chrétiennes célébraient la mémoire, le souvenir de ce dernier repas du Seigneur. L’Église primitive a eu davantage le souci de vivre l’Eucharistie que de faire un compte rendu détaillé de la dernière Cène.

Le Seigneur est un Dieu de tendresse, de miséricorde et de réconciliation. Le soir du jeudi saint, en plus de partager avec ses disciples le pain et le vin, il s’est mis à leur service, il leur a lavé les pieds. Il a demandé de se souvenir de ce geste d’amitié : «Faites ceci en mémoire de moi… faites comme moi j’ai fait pour vous»… Il ne s’agit pas d’une mémoire conservatrice, paralysante, mais d’une mémoire dynamique et ouverte, qui nous invite à faire des choses nouvelles, à nous impliquer dans notre monde pour le rendre meilleur.

À travers l’eucharistie, le Christ souligne certains éléments importants pour notre vie en Église : d’abord il nous rappelle que la haine et la division peuvent détruire la fraternité de nos rencontres eucharistiques. C’est pourquoi il nous dit dans l’évangile : «si, lorsque tu viens présenter ton offrande à l’autel, tu te souviens que ton frère a quelque chose contre toi, laisse-là ton offrande, va d’abord te réconcilier avec ton frère, puis viens présenter ton offrande

Les symboles de cette fête de l’eucharistie sont des symboles d’unité dans la diversité, de pain partagé entre tous. Nous nous retrouvons réunis : jeunes et vieux, de différents partis politiques, de différentes classes sociales. Il y a parmi nous des traditionalistes et des innovateurs, des saints et des pécheurs, des gens mariés et des célibataires. Mais tous, nous sommes frères et sœurs dans le Christ qui nous réunit autour de lui pour partager le pain de vie.

L’eucharistie a toujours un lien direct avec notre vie quotidienne. À la fin de la messe, le célébrant nous renvoie à nos familles, à nos maisons, à notre milieu de vie : «Allez dans la paix du Christ

À travers les siècles, des millions de chrétiens, au contact de la parole du Seigneur et au partage de son corps et de son sang, ont reçu une force nouvelle dans le sacrement que nous célébrons aujourd’hui.

Que cette fête du Corps et du Sang du Christ, cette fête de l’Eucharistie nous fasse mieux connaître le Dieu qui nous aime et nous considère comme ses propres enfants. Qu’elle redonne un sens à notre vie et augmente en chacun de nous la foi, l’espérance et la charité.



HOMÉLIE DOMINICALE

(Homélie du père Yvon-Michel Allard, s.v.d., directeur du Centre biblique des Missionnaires du Verbe Divin, Granby, QC, Canada)

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« Je suis avec vous tous les jours jusqu’à la fin du monde »

Les disciples retournent à la montagne où Jésus les réunissait pour prier et pour les instruire. Si l’on veut comprendre Dieu et saisir ce qu’il y a d’important dans la vie, il nous faut un peu de silence, de contemplation, de prière. Lorsque Moïse a rencontré Dieu dans la Montagne, il a d’abord enlevé ses sandales et il s’est prosterné le visage contre terre. Les Musulmans dans leurs mosquées, les Juifs dans leurs synagogues font encore aujourd’hui ces gestes de respect envers Dieu. Pascal disait: «Pour aimer une personne, il faut la comprendre, et pour comprendre Dieu, il faut l’aimer». Il y a des gens qui parlent de Dieu avec une grossièreté, une vulgarité, un dédain et un mépris qui donnent mal au cœur!. La fête d’aujourd’hui nous pose à nouveau la question : Qui est Dieu pour nous? Quel rôle joue-t-il dans nos vies? Cette célébration nous rappelle que Dieu est amour, qu’il est relation et communauté. C’est le sens de la Trinité. Dieu peut donc être expérimenté plus facilement en famille, en paroisse, en groupes d’amis, car il est unité dans la diversité.

Les évangiles et les lettres de Saint Paul nous rappellent que nous appartenons à la famille de Dieu. Nous ne sommes pas des esclaves qui vivons dans la crainte, mais des enfants créés à l’image de Dieu, qui nous offre de partager la sérénité, la paix et la fraternité. En cette grande fête de la Trinité, qui couronne le cycle de notre liturgie, nous sommes invités à redécouvrir notre Dieu et à nous demander quelle place il occupe dans notre vie. Un vieux moine égyptien posait la question aux chrétiens de son village : «Où est Dieu?» Ils répondirent : «Dieu est partout». Le moine répliqua : «Non, Dieu est là où on le laisse entrer». Dans l’Apocalypse, au chapitre 3, verset 20, le Seigneur frappe à notre porte, mais il n’entre que si nous lui ouvrons : «Voici, je me tiens à la porte et je frappe : si quelqu’un entend ma voix et ouvre la porte, j’entrerai chez lui pour souper, moi près de lui et lui près de moi.» Dieu est toujours très respectueux de notre liberté.

II y a plusieurs années, le célèbre écrivain soviétique Soljenytsine (Archipel du Goulag), obtenait la permission de sortir de Russie. Ses écrits contre le gouvernement de l’empire russe et ses cris en faveur de la liberté de pensée en avaient fait un témoin embarrassant. Soljenytsine qui avait passé de longues années en prison, condamné aux travaux forcés dans les goulags soviétiques, se retrouve alors dans notre civilisation de pleine liberté. Après quelques mois en Europe occidentale et aux États-Unis, on se serait attendu qu’il fasse l’éloge du régime capitaliste sous lequel il vivait désormais, on s’attendait à ce qu’il louange notre grande tolérance envers les idées, les mœurs et les libertés individuelles. Au contraire, Soljenytsine s’est mis à décrier avec autant de vigueur la faillite de l’Amérique et de l’Europe de l’ouest que celle du régime soviétique. Selon lui, nos sociétés capitalistes d’abondance étouffaient tout autant les valeurs spirituelles que le monde soviétique. Soljenytsine affirmait que seul un sursaut de spiritualité pouvait garantir l’avenir et l’épanouissement de l’humanité. Selon lui, Dieu seul pouvait offrir une vision de respect, de fraternité et de justice que notre monde avide de pouvoir et d’argent refusait d’accorder.

Il est bon de se demander quelle place Dieu occupe dans notre culture. Ces dernières années, l’intérêt des Québécois pour les vieux meubles, les armoires antiques, les chansons folkloriques et les coutumes du passé refait surface. Derrière cette résurrection du «monde d’antan», se glisse une certaine nostalgie des beautés de notre enfance et de nos souvenirs de jeunesse. La nostalgie n’apporte rien de très concret, mais cet exercice de mémoire peut nous permettre de découvrir les valeurs fondamentales de nos parents et de nos grands-parents. Comme le disait Moïse à son peuple: «Souvenez-vous du passé, Souvenez-vous de votre histoire, souvenez-vous de la foi de vos ancêtres.»

En tant que chrétiens, pouvons-nous reconnaître dans notre patrimoine les traces de la foi, de l’espérance et de la charité laissées par nos aïeux? Les églises de paroisse, les croix au bord des routes, le chapelet en famille, le mois de Marie, l’Angélus du midi, tout cela révélait l’attachement des gens à leur foi et à leur religion. Dieu était présent dans leur vie de tous les jours. Nos parents et grands-parents s’appuyaient sur leur sens religieux pour s’entraider et reconstruire, en corvées bénévoles, les granges et maisons dévastées par le feu ou par d’autres cataclysmes naturels. Ils vivaient au rythme de la vie liturgique. Ils ne connaissaient pas les longs week-ends, mais ils célébraient toute une série de fêtes religieuses en famille.

Il ne s’agit pas ici de revenir «au bon vieux temps», mais de nous demander si, comme nos ancêtres, nous sommes capables de faire une place à Dieu dans nos vies.

Que ce dimanche de la Trinité nous aide à redécouvrir la tendresse de Dieu qui nous accompagne tout au long de notre vie. «Je suis avec vous tous les jours jusqu’à la fin du monde



HOMÉLIE DOMINICALE

(Homélie du père Yvon-Michel Allard, s.v.d., directeur du Centre biblique des Missionnaires du Verbe Divin, Granby, QC, Canada.)

« Vous êtes mes amis« 

La page d’évangile d’aujourd’hui est un hymne composé en l’honneur de l’amour de Dieu et de l’amour des autres. Jésus livre le cœur de son message et nous confie son testament. Le mot amour (aimer, ami) est répété onze fois dans ce court passage. Jésus se présente comme étant le modèle de l’amour, dans ses paroles et dans ses gestes les plus simples. «Vous êtes mes amis» : ceci est le cœur même de notre relation avec Dieu. Parce que nous sommes ses amis, il nous met au courant des pensées et des plans de Dieu pour notre monde. Dieu nous invite à construire un monde de paix, de compréhension, de pardon, de partage, d’amitié et d’amour. Et ceci commence au cœur de nos familles où les enfants apprennent la tendresse, l’accueil, le pardon, la tolérance, le respect des autres, l’amour de Dieu.

Notre vie chrétienne peut se développer dans la mesure où nous permettons à cette amitié avec Dieu de grandir et de s’épanouir. Nombre de chrétiens font l’erreur de ne plus avoir de temps pour Dieu dans leur vie. Ils cessent de prier, de rencontrer le Seigneur le dimanche, d’enseigner à leurs enfants les valeurs chrétiennes. Lorsque l’aspect religieux a peu d’importance dans la vie de tous les jours, petit à petit, la foi se flétri, se dessèche et meurt et immanquablement les gens deviennent «des chrétiens non-pratiquants», c’est-à-dire des chrétiens qui non seulement ne fréquentent plus la communauté chrétienne, mais qui cesse de porter les fruits de ceux et celles qui sont unis au Christ, comme les sarments à la vigne.

L’Église, selon saint Jean, est le rassemblement des amis de Dieu. Nous sommes très différents les uns des autres : nous appuyons des partis politiques divergents, appartenons à des races distinctes, avons des revenus différents, des champs d’intérêt qui ne sont pas les mêmes… Malgré ces divergences, nous formons l’Église de Dieu. Ce qui nous rassemble, c’est l’amitié que Dieu a pour nous et l’amitié que nous avons les uns envers les autres.

L’amitié s’appuie sur le respect, l’ouverture et le service. L’une des plus belles images que nous ayons de Jésus est celle du lavement des pieds. À genoux devant ses apôtres, il est à leur service. «Vous m’appelez Maître et Seigneur, et vous dites bien car je le suis.» Et il ajoute : «dès lors, si je vous ai lavé les pieds, vous devez vous aussi vous laver les pieds les uns aux autres» (Jn 13, 13).

Le Christ est venu parmi nous pour nous révéler le vrai visage de Dieu. Cette découverte change notre conception du monde. Jusque-là, on croyait que Dieu avait des comptes à régler avec l’humanité pécheresse, que le Messie venait pour punir les pécheurs que nous sommes. En Jésus-Christ, nous découvrons un Dieu qui est Amour, qui n’a pas de comptes à régler mais qui vient à notre recherche afin de nous offrir son amitié. Il nous déclare son amour et nous invite à nous aimer les uns les autres.

Notre Dieu est celui qui ouvre les bras à l’enfant prodigue, recherche la brebis perdue, accueille Marie-Madeleine, s’invite chez Zachée, protège la femme adultère, fait table commune avec les publicains et les pécheurs, guérit l’aveugle de Jéricho, promet le paradis au bon larron, entre en contact avec les lépreux, guérit la fille de la Siro-phénicienne, ressuscite le serviteur du centurion romain, ouvre le dialogue avec la Samaritaine, etc. Ceux et celles qui veulent nous faire peur avec une fausse image de Dieu n’ont pas lu les évangiles et les lettres de saint Paul !

Notre Dieu qui est bon, tendre et miséricordieux veut être notre ami. «Je vous appelle mes amis car tout ce que j’ai appris de mon Père, je vous l’ai fait connaître».



HOMÉLIE DOMINICALE

(Homélie du père Yvon-Michel Allard, directeur du Centre biblique des Missionnaires du Verbe Divin, Granby, QC, Canada)

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Chaque année, lors du 4e dimanche de Pâques, la liturgie nous parle du bon pasteur, en utilisant chaque fois un autre texte des évangiles. Le symbole du berger qui conduit son troupeau est présent dans tout l’ancien orient, pour désigner les rois et les chefs de clans. Dans la Bible, cette image s’applique aussi à Dieu, le pasteur de son peuple: «Voici votre Dieu qui vient : comme un berger, il fait paître son troupeau; il rassemble les brebis égarées, il porte les agnelets, il procure de la fraîcheur aux brebis qui le suivent» (Isaïe). «Le Seigneur est mon berger, je ne manque de rien» (Ps 22). Jésus lui-même se présente comme «le bon pasteur.»

La comparaison était facile à comprendre pour un peuple de nomades en marche vers la Terre Promise. Ses plus grands chefs avaient été des bergers : Abraham et ses troupeaux de petit bétail, Moïse, berger dans le désert qui reçoit la révélation du buisson ardent, David qui garde les moutons de son père, à Bethléem.

Dans l’Orient ancien, le berger n’était pas un personnage romantique comme nous nous le représentons souvent aujourd’hui. Le berger était un homme courageux, qui savait défendre ses brebis des animaux sauvages et des voleurs. Dans 1 Samuel 17, 34-36, David dit au roi Saül qui voulait l’empêcher de combattre le géant Goliath : «Quand je faisais paître les brebis de mon père et que venait un lion ou un ours qui enlevait une brebis du troupeau, je le poursuivais, je le frappais et j’arrachais celle-ci de sa gueule. Et s’il se dressait contre moi, je le saisissais et je le frappais à mort.»

Dans le christianisme la représentation du Christ, le Bon Pasteur se retrouve partout : dans les catacombes, les maisons des chrétiens, leurs salles de réunions.  C’est l’une des premières images du Seigneur ressuscité et notre «pratique pastorale» a pris son nom de cette représentation du Seigneur, le pasteur de son peuple. Encore aujourd’hui, les évêques utilisent la crosse du berger comme symbole de leur ministère pastoral. Le Bon Pasteur, c’est celui qui permet à ceux et celles qui lui sont confiés de «vivre pleinement». D’ailleurs, le verset qui précède le texte d’aujourd’hui le dit clairement : «Je suis venu pour qu’ils aient la vie, et qu’ils l’aient en abondance». (Jean 10, 10)

Saint Jean, dans son évangile, met l’accent sur l’individualité de chacun et l’importance que nous avons pour Dieu. «Je suis le bon pasteur. Je connais mes brebis et mes brebis me connaissent». Lorsque quelqu’un est important pour nous, nous connaissons son nom, qu’il s’agisse des membres de notre famille, de nos amis, de nos collègues, des gens de notre entourage. La connaissance d’une personne nous permet de l’aimer et de la respecter. La haine, par contre, détruit l’individualité, et regroupe les gens en leur donnant une étiquette négative. C’est alors beaucoup plus facile de lutter contre eux et de les éliminer. Les préjugés et la haine réduisent un groupe à une étiquette, une abstraction. On ne connaît plus le nom des personnes, ils n’ont plus de visage, nous ne savons plus qui ils sont. Un exemple extrême de ce comportement est apparu dans les camps d’extermination nazis durant le temps d’Hitler. La gestapo tatouait un numéro sur le bras des prisonniers juifs. Ils n’étaient plus des individus mais des ennemis de l’état, sans visage, sans personnalité propre. Ils devenaient des prisonniers avec un numéro d’identification. Ceci se passe encore aujourd’hui dans de nombreuses prisons. Les numéros et les catégories rendent la haine, la torture et le meurtre plus facile. Il est toujours dangereux de regrouper les gens dans des catégories toutes faites : «les Juifs», «les Musulmans», «les Catholiques», «les Protestants», «les Noirs», «les homosexuels», «les prostituées», etc.

Dans l’évangile d’aujourd’hui, le Seigneur refuse cette négation de la personne. Il connaît ses brebis et il les appelle par leur nom. Le bon pasteur est le Dieu des Juifs, des Samaritains, des Musulmans, des Hindous, des Chrétiens : «J’ai encore d’autres brebis qui ne sont pas de cette bergerie.» Le bon pasteur est celui qui se préoccupe, qui prend le temps de connaître, qui répond aux besoins d’une personne à la fois : Marie Madeleine, Zachée, la cananéenne, le bon larron, le paralytique, la samaritaine, le lépreux, Nicodème, l’aveugle de Jéricho, etc.

En ce dimanche du bon pasteur, nous sommes invités à marcher dans les traces du Seigneur, d’être de bons pasteurs pour les gens autour de nous. À la fin de notre vie, espérons que l’on pourra dire de nous ce qu’on a dit du Christ : «Il a passé sa vie à faire du bien et a aidé les autres à avoir la vie en abondance».

 



HOMÉLIE DOMINICALE

Dimanche 8 avril 2018

2ème  Dimanche de Pâques – B

(Homélie du Père Yvon-Michel Allard, s.v.d., directeur du Centre biblique des Missionnaires du Verbe Divin, Granby, QC, Canada.)

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« Jésus vint, et il était là au milieu d’eux« 

Jésus ressuscité se manifeste «le dimanche», le premier jour de la semaine. Les chrétiens ne se réunissaient pas tous les jours. Ils avaient eux aussi, leur travail, leur vie quotidienne. Ils ne pouvaient pas toujours être ensemble. Or, c’est dans le cadre de leur «rencontre hebdomadaire» que Jésus vient. Ceci nous indique que la foi n’est pas une affaire strictement personnelle, ou individuelle. La présence du Christ ressuscité est surtout ressentie, expérimentée, dans le cadre de nos rencontres communautaires, lorsque nous sommes réunis en Église.

On ne peut vivre sa foi seul : la foi a besoin de se nourrir de la parole de Dieu et de s’alimenter de la foi des autres. Ils se rencontrent mais ils ont peur. Au moment où saint Jean écrit son évangile, c’est toujours un temps de persécution. Les disciples ont pris l’habitude de se réunir tantôt chez l’un, tantôt chez l’autre. Ils s’accueillent, mais il y a des défections, des gens qui abandonnent le groupe. Ils verrouillent leurs portes. Mais voici que chaque dimanche, se renouvelle le «signe» du Cénacle. Mystérieusement, le Christ se glisse parmi les siens, dans le lieu où ils se rassemblent, à Éphèse, Antioche, Corinthe, Jérusalem, Rome. Chaque dimanche, c’est Pâques! «Tu es là, au cœur de nos vies, et c’est Toi qui nous fais vivre.» L’Église c’est d’abord et avant tout la réunion d’hommes et de femmes au milieu desquels le Christ ressuscité se rend présent.

La première parole du Christ après sa résurrection est une parole de paix, une parole qui, comme un refrain, revient régulièrement dans le texte d’aujourd’hui : «la paix soit avec vous». Le premier don du ressuscité, c’est le don de la paix qui chasse la crainte et le doute : «Shalom». Cette paix n’est pas celle du monde, c’est la paix confiée comme un héritage précieux le soir du jeudi saint : «C’est la paix que je vous laisse, c’est ma paix que je vous donne»…

La présence du Seigneur provoque la joie. La joie de la résurrection est celle qui vient après la peur, après la souffrance, après le doute. La joie pascale, la joie chrétienne, n’est pas une joie facile, spontanée, ce n’est pas celle qui nous éprouvons quand tout va bien, quand la santé est bonne, quand la jeunesse est là, pleine de vitalité, quand nos entreprises réussissent, quand nos relations amicales et familiales sont agréables. La joie de la résurrection, c’est celle qui vient «après»… après l’angoisse, après la crise! C’est la joie et la paix qui remontent d’une situation désespérée (la mort d’un crucifié!) et que rien ne pourra faire disparaître : c’est la joie des disciples d’Emmaüs après le découragement de la mort du Christ.

Bien sûr, nous avons tous nos peurs. Peur de Dieu, peur des autres, peur de souffrir, de manquer d’argent, de ne pas être à la hauteur, de vieillir, de mourir. La liste de nos peurs est longue, trop longue, et ces peurs nous empêchent d’être heureux et de connaître la joie. Le Christ nous dit ce matin : «N’ayez pas peur, ayez confiance en moi. J’ai vaincu la pire des peurs : celle de la mort»

La présence du Christ nous rassemble malgré nos divergences, malgré nos différences. La communauté chrétienne est ouverte aux gens de toutes les couleurs, de tous les partis politiques, de toutes les ethnies, de toutes les langues. C’est le contraire de la tour de Babel. Saint Paul dira : «Parmi vous, il n’y a ni Grecs ni Juifs, ni hommes ni femmes, ni esclaves ni hommes libres».

Lors de cette première rencontre du Christ avec ses disciples, il leur donne une vie nouvelle : «il répandit sur eux son souffle et il leur dit: Recevez l’Esprit Saint», le souffle de vie. Le don de l’Esprit, rappelle le texte de la création d’Adam et Ève quand l’Esprit de Dieu leur insuffla la vie. Il s’agit d’une «création nouvelle»Nous sommes, renouvelés, recréés

«Recevez l’Esprit Saint. Tout homme à qui vous remettrez ses péchés, ils lui seront remis.» Ces paroles sont adressées à l’ensemble des disciples du Christ. C’est un appel à nous libérer mutuellement en nous pardonnant les uns les autres : «De même que le Père m’a envoyé, moi aussi, je vous envoie». Nous sommes désormais les messagers de sa «miséricorde divine»! «Tous ceux à qui vous remettrez les péchés, ils leurs seront remis.» Nous sommes investis de la même mission que celle de Jésus : «L’Esprit de Dieu repose sur moi, l’Esprit de Dieu m’a consacré, il m’a envoyé porter la bonne nouvelle aux pauvres, annoncer une année de bienfaits de la part de Dieu, libérer les captifs ». Nous sommes porteurs de cet Esprit libérateur qui donne la vie.

A l’heure où un très grand nombre de baptisés ne fréquentent plus les églises, nos rassemblements dominicaux sont importants et nous permettent d’entretenir et vivifier notre foi de croyants! On ne peut vivre sa foi seul : la foi a besoin de se nourrir de la parole de Dieu et de s’alimenter de la foi des autres. Alors qu’ils étaient réunis pour célébrer l’eucharistie, «Jésus vint, et il était là au milieu d’eux.»



HOMELIE DOMINICALE

(Homélie du Père Yvon-Michel Allard, directeur du Centre biblique des Missionnaires du Verbe Divin, Granby, QC, Canada.)

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N’ayez pas peur! Jésus de Nazareth, le crucifié, est ressuscité; il n’est pas ici…

Si aujourd’hui, après 2000 ans de christianisme, nous célébrons la grande fête de Pâques c’est parce qu’une chaîne ininterrompue de croyants nous ont transmis cette foi pleine d’espérance dans la résurrection du Christ. S. Paul disait dans sa première lettre aux Corinthiens : «Je vous ai transmis en premier lieu ce que j’avais moi-même reçu, à savoir que le Christ est mort pour nos péchés selon les Écritures, qu’il a été mis au tombeau, qu’il est ressuscité le troisième jour selon les Écritures, qu’il est apparu à Pierre, puis aux Douze. Ensuite, il est apparu à plus de cinq cents frères à la fois – la plupart d’entre eux vivent encore et quelques-uns se sont endormis – ensuite il est apparu à Jacques, puis à tous les apôtres. Et, en tout dernier lieu, il m’est apparu à moi aussi, comme à l’avorton. » (1 Cor 15, 3-8)

Nous sommes réunis aujourd’hui grâce à la transmission de cette Bonne Nouvelle à travers les siècles. Nous célébrons la victoire de la vie sur la mort. Nous célébrons Jésus Christ, notre espérance, qui donne un sens à notre vie, malgré les angoisses, les souffrances et les difficultés de tous les jours.

L’énorme pierre qui scellait le tombeau est le symbole de notre incapacité de vaincre la mort par nous-mêmes. «Les femmes se disaient entre elles: <Qui nous roulera la pierre pour dégager l’entrée du tombeau?> – Puis elles se rendirent compte qu’on avait roulé la pierre, qui était très grande.» Ce détail concret est souligné par les quatre évangélistes. Pour Marc et pour nous aujourd’hui, cette pierre indique qu’une véritable muraille sépare l’être humain de la résurrection : «qui pourrait enlever cet obstacle»?» Seul Dieu peut supprimer le poids écrasant de la mort qui pèse sur l’humanité.

Ce qui est important dans le récit d’aujourd’hui, ce n’est pas la tombe vide mais l’annonce de la résurrection. Les femmes ont rencontré un messager qui leur révéla la résurrection de Jésus. Pâques c’est la fête de cette grande révélation; c’est la fête de la joie et de l’espérance. Les femmes furent saisies de stupeur, mais il leur dit: « N’ayez pas peur...» Si l’apparition de Dieu bouleverse, sa présence aussitôt rassure et apaise. Le vrai Dieu n’est pas celui qui joue sur la peur, mais celui qui donne espérance.

Le messager ajoute ensuite : «Allez dire à ses disciples qu’il les précède en Galilée…» La Galilée, c’est là où ils sont nés, où ils travaillent, où vivent leurs familles. Le Christ les accompagne dans le quotidien de leur vie, dans leur propre Galilée. Allez! Ne restez pas près de ce tombeau vide. Allez là où Jésus vous précède, là où il vous a fixé rendez-vous.

Normalement, tout finit au cimetière. Dans l’histoire du Christ, tout commence au cimetière, autour d’un tombeau vide. Et le messager ne dit pas aux femmes : «Allez dire aux disciples de venir ici pour voir un tombeau vide.» Mais il leur dit : «Allez dire à ses disciples et à Pierre qu’ils retournent en Galilée. Là il trouveront le Seigneur». La communauté des disciples n’est pas recréée autour d’une tombe, mais autour de Jésus ressuscité. «Il n’est plus ici, il est ressuscité… Il vous précède en Galilée.» Il vous attend là où vous vivez.

Chaque dimanche, les chrétiens se rassemblent dans leur Galilée, dans leur ville, dans leur village, dans leur paroisse, autour du Christ ressuscité: «Là où deux ou trois sont réunis en mon nom, je suis au milieu d’eux.» Et le Christ de la Pâques marche avec nous, il nous accompagne : «Je suis le chemin, la vérité, la vie… Celui qui me suit ne marche pas dans les ténèbres.»

En ce jour de la résurrection, le Christ nous invite à recommencer à vivre pleinement, à passer de la peur à la joie, du passé au présent, de l’hiver au printemps, de la mort à la vie. Aujourd’hui, nous célébrons la plus grande victoire qui existe, la victoire du Christ sur la mort.

Nous savons très bien que les victoires de notre pauvre monde ne résistent pas à l’usure du temps. Dans les sports, les victoires durent le temps d’une saison, puis tout est oublié. En politique, les chefs d’états sont élus avec fanfare et grandes célébrations, puis la population se lasse de leurs erreurs et leur corruption. Les sondages les condamnent alors à une défaite souvent humiliante.

Pour ce qui est des victoires militaires, elles durent si peu longtemps. Je pense à la grande victoire des alliés en 1945. Plus de 400 000 soldats américains sont morts pendant la seconde guerre mondiale – sans compter les millions d’habitants d’autres pays -. On croyait alors que ces sacrifices apporteraient la paix pendant des dizaines et des dizaines d’années. On était certain que la mort de millions de personnes et la création des Nations Unies assureraient la paix pendant longtemps. Mais en moins de 10 ans, 54 246 Américains sont tués en Corée et 50 000 mourront au Vietnam. Les troupes peuvent célébrer les victoires militaires les unes après les autres, mais ces victoires ne durent que peu de temps.

Une véritable victoire demande la permanence, et c’est ce que nous offre la victoire du Christ sur le mal et sur la mort. Jésus apporte l’espoir là où il y a le désespoir, l’amour, où il y a la haine. Il apporte le pardon où il y a le désir de vengeance. Il apporte la vie là où règne la mort.

En ce premier jour de la semaine, en ce jour de la résurrection du Seigneur, Joyeuses Pâques à tous.



HOMÉLIE DOMINICALE

Chers visiteurs,

En ce 5ème dimanche du Temps de Carême, nous vous proposons de lire :

l’Homélie du Père Yvon-Michel Allard, directeur du Centre biblique des Missionnaires du Verbe Divin, Granby, QC, Canada

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Aujourd’hui, les textes de la liturgie sont pleins de références au pardon de Dieu pour nous :

  • «Je pardonnerai leurs fautes  et ne me rappellerai plus de leurs péchés …» (1re lecture : Jér 31, 34)
  • «Aies pitié de moi, ô mon Dieu. Selon ta grande miséricorde, efface tous mes péchés» (Ps 50)
  • «Quand j’aurai été élevé de terre, j’attirerai à moi tous les hommes» (évangile)

La saison du carême nous est présentée comme un temps de réconciliation avec Dieu et avec les autres. Pendant les deux dernières semaines de cette période de préparation à Pâques, nombre de célébrations pénitentielles seront offertes dans les différentes paroisses de nos diocèses.

Dieu veut renouveler son alliance avec nous. Nous sommes tous des pécheurs, un peu comme les pharisiens devant la femme adultère. Nous accusons facilement les autres mais lorsque le Christ nous invite à lancer la première pierre si nous sommes sans péché, nous nous éloignons la tête basse, en commençant par les plus vieux, sachant très bien que nous sommes aussi pécheurs que cette pauvre femme. C’est là notre condition humaine.

Comme le roi David dans le psaume d’aujourd’hui, nous reconnaissons nos tors : «efface mon péché. Lave moi tout entier de ma faute, purifie-moi de mon offense».

Non seulement Dieu pardonne, mais il oublie, il ne se souvient plus. Comme l’affirme le très beau psaume 130 : «Si tu te souviens des fautes, o mon Dieu, qui subsistera. Mais en toi est le pardon…»

Chacune de nos célébrations eucharistiques est pleine de références à la grande miséricorde de Dieu : Au début de l’eucharistie, nous reconnaissons notre péché, condition nécessaire pour entrer dans l’esprit de célébration, et demandons au Seigneur de nous pardonner : «Seigneur, prend pitié». Au Notre Père nous prions Dieu de «nous pardonner nos offenses comme nous pardonnons à ceux qui ont péché contre nous», une proposition sérieuse qui nous oblige à imiter Dieu dans sa miséricorde. Immédiatement avant l’échange de paix, le célébrant demande au Seigneur : «ne regarde pas nos péchés mais la foi de ton Église». Et c’est une Église pécheresse qui chante : «Toi qui enlèves le péché du monde, prends pitié de nous». Le célébrant demande au Seigneur «que cette communion à son corps et à son sang n’entraîne pour nous ni jugement ni condamnation».

La reconnaissance de notre péché n’est donc pas un obstacle à la présence de Dieu parmi nous. Elle est la condition d’une nouvelle relation avec lui. Pendant la prière de consécration, le Christ proclame : «ceci est la coupe de mon sang, le sang de l’Alliance nouvelle et éternelle, qui sera versé pour vous et pour la multitude en rémission des péchés.»

La croix nous rappelle que nous sommes les fils et les filles de Dieu. Il est notre Père et il est toujours prêt à nous pardonner et à offrir sa vie pour nous. Il veut que nous ayons la vie en abondance.

La beauté du sacrement de réconciliation, c’est qu’il nous offre toujours l’occasion de renouveler notre alliance avec le Seigneur. La vieille expression «faire ses Pâques» voulait dire justement qu’au moins une fois dans l’année le chrétien en profitait pour rafraîchir et embellir sa relation avec Dieu.

Profitons des derniers jours du carême pour nous réconcilier et pour nous préparer à la grande fête de Pâques, en nous rappelant les paroles d’Ézéchiel : «Je vous donnerai un cœur nouveau, je mettrai en vous un esprit nouveau ; j’enlèverai votre cœur de pierre et je vous donnerai un cœur de chair. Je mettrai en vous mon propre Esprit, je vous ferai marcher selon mes lois, garder et pratiquer mes coutumes» (Ézéchiel 36, 26-27).



HOMÉLIE DOMINICALE

Dimanche 11 mars 2018

4ème dimanche du Carême – B

( Homélie du Père Yvon-Michel Allard, directeur du Centre biblique des Missionnaires du Verbe Divin, Granby, QC, Canada)

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« Dieu a tant aimé le monde qu’il a donné son fils unique »

Il existe dans l’histoire des moments de hautes valeurs religieuses et humaines. La rencontre de Jésus avec Nicodème est l’un de ces moments. Le Christ révèle au pharisien en recherche de vérité que «Dieu a tant aimé le monde qu’il a donné son fils unique, afin que celui qui croît en lui ne meure pas mais ait la vie éternelle».

Dieu aime notre monde, il nous aime malgré nos violences, nos injustices, nos faiblesses et nos péchés. «Dieu a envoyé son Fils dans le monde, non pas pour juger le monde, mais pour que, par lui, le monde soit sauvé.»

L’humanité est malade et sous l’emprise des forces du mal et de la mort : guerres, destruction, violence.  Mais il existe une autre force, une force de vie qui unit au lieu de diviser, apaise au lieu d’angoisser, guérit au lieu de blesser. Cette force nous invite à plus de justice, de paix et de fraternité.

«Dieu a tant aimé le monde». Ces quelques paroles expriment tout le message chrétien de la rédemption. Paul Claudel écrivait : «Nous ne sommes pas chrétiens parce que nous aimons Dieu mais parce que nous croyons que Dieu nous aime».

Nous savons que nous ne pouvons-nous en sortir seuls et plus nous vieillissons, plus cette vérité devient évidente. Je ne sais si vous avez déjà vu dans un film où une personne essaie, de ses propres forces, de se  sortir des sables mouvants. Plus elle se débat, plus les sables l’attirent vers le gouffre. Seule une main extérieure, peut l’aider à s’en sortir. Nous vivons tous dans des sables mouvants et la main de Dieu est notre seule perche de secours.

Albert Camus, dans son célèbre roman  « La peste » décrit l’état misérable et fatal de l’être humain.  Il utilise la peste comme métaphore pour indiquer le mal qui se cache en nous : «Je sais… que chacun de nous la porte en son cœur cette peste et que personne, non personne n’est immunisé.» Dans les Écritures, Dieu est souvent présenté comme le «médecin» qui peut nous guérir de cette maladie mortelle.

De nos jours, nombreux sont ceux qui ressentent une sorte de pessimisme vis-à-vis le mal dans notre univers : «le monde est pourri… il n’y a rien à y faire : violences, prises d’otage, égoïsmes collectifs, fraudes gigantesques, dépravation morale, drogue, guerres»… Nous avons parfois l’impression que le monde traverse une époque glaciale où manque la chaleur de l’amour. Mais l’amour de Dieu est toujours présent dans ce froid hivernal.

Grâce à son fils et à l’Esprit Saint, le Père veut redonner à notre monde une vie nouvelle, nous permettre de passer des ténèbres à la lumière, du péché à la grâce, de la haine à l’amour, de l’incrédulité à la foi, du découragement à l’espérance, de la mort à la vie.

Nicodème qui rencontre le Seigneur pendant la nuit est un chercheur de Dieu. Étant membre du Sanhédrin, il défendra Jésus lors du procès du vendredi saint et, après la mise à mort sur la croix, il l’ensevelira dans une tombe toute neuve. Ce chercheur de la lumière dans la nuit de ses peurs et de ses doutes, a pressenti une lueur d’espoir en Jésus.

Chaque dimanche la communauté chrétienne se rassemble pour se rappeler le projet de Dieu. Chaque dimanche, Dieu nous invite à accepter son amour, à agir comme lui pour donner à notre monde plus de joie, de paix et d’amour. Être disciple du Christ, c’est essayer de marcher derrière lui, de suivre son exemple, d’agir comme il l’a fait lui-même. Saint Paul disait aux Éphésiens «Montrez-vous bons et compatissants les uns envers les autres, vous pardonnant mutuellement, comme Dieu vous a pardonné dans le Christ».

Le message du Carême est un message d’espérance : notre vie n’est pas un voyage sans but  et sans espoir. Notre vie n’est pas une «passion inutile», comme l’affirmait Jean-Paul Sartre. Autour du pain et de la parole de Dieu, nous nous rassemblons chaque dimanche pour célébrer notre espérance chrétienne : «Dieu a tant aimé le monde qu’il a donné son fils unique afin que celui qui croît en lui ne meure pas mais qu’il ait la vie éternelle»



HOMÉLIE DOMINICALE

Homélie du Père Yvon-Michel Allard, directeur du Centre biblique des Missionnaires du Verbe Divin, Granby, QC, Canada.

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Convertissez-vous et croyez à la Bonne Nouvelle

Le carême, en tant que période de préparation à la fête de Pâques, remonte au 4e siècle et fut institué pour répondre à deux objectifs : préparer les aspirants au christianisme à la réception du sacrement du baptême, permettre aux chrétiens de renouveler la ferveur de leur propre engagement chrétien.

Aujourd’hui, comme ce ne sont plus les adultes mais les enfants qui reçoivent le baptême, le premier objectif a perdu de son importance, mais le second reste toujours valable. Le carême est pour chacun et chacune d’entre nous l’occasion de renouveler notre engagement chrétien en alimentant notre foi à la parole de Dieu et en nous rappelant que «nous ne vivons pas seulement de pain». (Mt 4, 4) Pendant ces quarante jours, le Christ nous invite à nous joindre à sa «révolution», une révolution intérieure qui commence d’abord en chacun et chacune de nous.

L’essentiel de ce processus de conversion est de nous attacher à la personne du Christ. Une fois ce lien établi, nous pouvons plus facilement lutter contre le mal. On connaît bien la «conversion» de saint Paul. Il n’était pas un grand pécheur, bien au contraire car, selon la loi juive, il était un homme irréprochable, mais il a adhéré à Jésus Christ, et cela a bouleversé sa vie.

Pendant ce temps de préparation à la fête de Pâques, l’Église nous propose trois moyens pour raviver la flamme de notre engagement chrétien : le jeûne, la prière et le partage.

En ce premier dimanche de carême, j’aimerais mettre l’accent sur le jeûne, un élément qui n’est pas très populaire dans notre civilisation de consommation mais qui demeure un des piliers de toute spiritualité authentique. Les musulmans, par exemple, continuent de le pratiquer particulièrement pendant le Ramadam.

Lorsque Jésus parle de jeûne, il ne s’agit pas de perte de poids, de pantalons trop petits et de taille trop ronde. Il ne s’agit pas non plus d’aliments santé qui nous permette de manger davantage. Il y a des raisons plus sérieuses pour jeûner.

Nous devons jeûner lorsque ça ne tourne pas rond dans notre propre vie :

  • quand Dieu n’est plus présent et qu’il est remplacé par nos veaux d’or, nos dogmes économiques, nos idoles de toutes sortes…
  • lorsque les conflits familiaux conduisent à la violence et à la haine;lorsque nous refusons le pardon à ceux et celles qui nous ont offensés.
  • lorsque nous sommes sous l’influence de nos addictions de toutes sortes.

Nous jeûnons aussi pour retrouver la solidarité avec :

  • la grande majorité des habitants de notre planète qui souffrent de sous alimentation;
  • les 3.000.000 de personnes meurent de faim chaque jour à travers le monde;
  •  les innombrables personnes qui ne peuvent se procurer les médicaments dont ils ont besoin;
  •  les millions d’habitants qui ont le virus du Sida;
  • -les milliers de personnes qui, tous les jours, meurent le long des routes de l’Inde;
  • le nombre incalculable d’enfants, de femmes, de personnes âgées tués ou blessés par les guerres
  • les millions de personnes âgées qui souffrent de solitude et de manque d’affection, etc.
  • les enfants que l’on oblige à travailler comme des esclaves, dix-douze heures par jour
  • les enfants soldats qui se font massacrer pour maintenir au pouvoir des dictateurs sanguinaires, etc.

Nous voulons être solidaires avec tous ceux et celles qui portent le fardeau de la souffrance, de la maladie, de l’injustice et de la discrimination.

Le jeûne peut prendre plusieurs visages et plusieurs formes:

  • jeûne de nourriture… un peu tous les jours, ou deux ou trois fois par semaine;
  • jeûne de télévision, de magasinage inutile, de dépenses extravagantes;
  •  jeûne de partage avec ceux et celles qui vivent dans la misère;
  • jeûne de temps de nos loisirs, ce qui nous permet de faire du bénévolat; etc.

C’est surtout pendant les périodes plus difficiles que le jeûne peut nous aider à redimensionner nos priorités et nos objectifs de vie.

Le jeûne est un moyen efficace pour nous aider à trouver une alternative aux valeurs de notre monde de consommation, de cupidité et d’injustice. L’argent que nous épargnons sur les loisirs, la nourriture, le magasinage, le luxe peut être partagé avec d’autres. Notre temps et nos talents peuvent venir en aide à ceux et celles dans le besoin : «Chaque fois que vous l’avez fait à l’un de ces petits qui sont mes frères, c’est à moi que vous l’avez fait» (Mt 25, 31-46)