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DECES DU FRERE JEAN PIERRE « DE TIBHIRINE »

Chers Visiteurs, le frère Jean-Pierre Schumacher, dernier survivant de la communauté de Tibhirine dont sept frères furent enlevés et tués en 1996, s’est éteint ce dimanche 21 novembre 2021 au Maroc, où il continuait à faire vivre l’esprit de sa communauté d’origine.

VN: « Il était, depuis le décès du frère Amédée en 2008, le dernier survivant de la communauté de Tibhirine: le frère Jean-Pierre Schumacher s’est éteint ce dimanche 21 novembre 2021, à l’âge de 97 ans, a fait savoir le père Jean-Marie Lassausse, prêtre de la Mission de France qui avait animé le prieuré après le départ des trappistes.

Né le 15 février 1924 en Lorraine, Jean-Pierre Schumacher avait été un « malgré-nous », l’un des jeunes Alsaciens et Lorrains enrôlés de force dans la Wehrmacht. Il échappera néanmoins à l’envoi sur le front de l’Est grâce à un certificat médical faisant état d’une tuberculose.(…)

Lire la suite de l’article et visionner la rencontre du Frère Jean Pierre avec le Pape François, en cliquant sur la photo:



TESTAMENT SPIRITUEL DU FRÈRE CHRISTIAN DE CHERGE

Chers visiteurs, à la veille de la béatification des martyres d’Algérie, nous tenons à vous faire partager le très beau témoignage du frère Christian de Chergé, prieur de la communauté de Tibhirine. Ci-dessous vous trouverez le témoignage lu par Michael Lonsdale qui interprétait le rôle du frère Luc dans le film « Des hommes et des Dieux », puis le texte en français.

Testament spirituel de Christian de Chergé

Quand un A-DIEU s’envisage…( comprendre: Quand un A Dieu sans visage)

« S’il m’arrivait un jour – et ça pourrait être aujourd’hui – d’être victime du terrorisme qui semble vouloir englober maintenant tous les étrangers vivant en Algérie, j’aimerais que ma communauté, mon Église, ma famille, se souviennent que ma vie était DONNÉE à Dieu et à ce pays. Qu’ils acceptent que le Maître Unique de toute vie ne saurait être étranger à ce départ brutal. Qu’ils prient pour moi : comment serais-je trouvé digne d’une telle offrande ? Qu’ils sachent associer cette mort à tant d’autres aussi violentes, laissées dans l’indifférence de l’anonymat.

Ma vie n’a pas plus de prix qu’une autre. Elle n’en a pas moins non plus. En tout cas, elle n’a pas l’innocence de l’enfance. J’ai suffisamment vécu pour me savoir complice du mal qui semble, hélas, prévaloir dans le monde et même de celui-là qui me frapperait aveuglément. J’aimerais, le moment venu avoir ce laps de lucidité qui me permettrait de solliciter le pardon de Dieu et celui de mes frères en humanité, en même temps que de pardonner de tout cœur à qui m’aurait atteint. Je ne saurais souhaiter une telle mort. Il me paraît important de le professer. Je ne vois pas, en effet, comment je pourrais me réjouir que ce peuple que j’aime soit indistinctement accusé de mon meurtre. C’est trop cher payer ce qu’on appellera, peut-être, la « grâce du martyre » que de la devoir à un Algérien, quel qu’il soit, surtout s’il dit agir en fidélité à ce qu’il croit être l’Islam.
Je sais le mépris dont on a pu entourer les Algériens pris globalement. Je sais aussi les caricatures de l’Islam qu’encourage un certain islamisme. Il est trop facile de se donner bonne conscience en identifiant cette voie religieuse avec les intégrismes de ses extrémistes. L’Algérie et l’Islam, pour moi, c’est autre chose, c’est un corps et une âme. Je l’ai assez proclamé, je crois, au vu et au su de ce que j’en ai reçu, y retrouvant si souvent ce droit fil conducteur de l’Évangile appris aux genoux de ma mère, ma toute première Église. Précisément en Algérie, et, déjà, dans le respect des croyants musulmans. Ma mort, évidemment, paraîtra donner raison à ceux qui m’ont rapidement traité de naïf, ou d’idéaliste : « Qu’il dise maintenant ce qu’il en pense ! » Mais ceux-là doivent savoir que sera enfin libérée ma plus lancinante curiosité. Voici que je pourrai, s’il plaît à Dieu, plonger mon regard dans celui du Père pour contempler avec Lui ses enfants de l’Islam tels qu’Il les voit, tout illuminés de la gloire du Christ, fruits de Sa Passion investis par le Don de l’Esprit dont la joie secrète sera toujours d’établir la communion et de rétablir la ressemblance en jouant avec les différences.

Cette vie perdue totalement mienne et totalement leur, je rends grâce à Dieu qui semble l’avoir voulue tout entière pour cette JOIE-là, envers et malgré tout. Dans ce MERCI où tout est dit, désormais, de ma vie, je vous inclus bien sûr, amis d’hier et d’aujourd’hui, et vous, ô mes amis d’ici, aux côtés de ma mère et de mon père, de mes sœurs et de mes frères et des leurs, centuple accordé comme il était promis ! Et toi aussi, l’ami de la dernière minute, qui n’aura pas su ce que tu faisais. Oui, pour toi aussi je le veux ce MERCI, et cet « À-DIEU » envisagé de toi. Et qu’il nous soit donné de nous retrouver, larrons heureux, en paradis, s’il plaît à Dieu, notre Père à tous deux.

AMEN ! Inch’Allah ! « 

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JE SUIS ENFANT DE DIEU – MICHAEL LONSDALE

 « Je suis enfant de Dieu, il n’y a pas de programme de vie plus beau que ça ! »

Chers visiteurs, voici l’extrait d’une interview donné au début du mois par Michael Lonsdale au magazine

 

  • Quelle est votre expérience de la prière ?

Vous connaissez le magnifique Récit d’un pèlerin russe. J’ai eu l’occasion de jouer au théâtre ce saint personnage et cette expérience m’a beaucoup marqué. La prière continuelle du pèlerin russe est quelque chose de splendide. Son but est d’être en présence continue avec le Seigneur. C’est très simple et très impressionnant !

  • Ce n’est pas donné à tout le monde d’être un mystique !

Prier n’est pas quelque chose de forcément difficile à mettre en œuvre. Je prie comme ça, n’importe où, et je n’ai pas nécessairement besoin de chapelle. Je vois le Christ dans les hommes. Je pense à Jésus, je Le prie. Et j’ai parfois ma « petite extase »… C’est un émerveillement que de penser à Lui, un Être parfait, le Fils de Dieu. Tout d’un coup, on se rend compte qu’il y a sa Parole dont nous pouvons nous nourrir. Car Jésus, ce n’est pas une histoire, c’est la vérité, c’est du vécu !

  • Comment vivre sa vie chrétienne ?

Je suis enfant de Dieu. Il est mon Père. Il n’y a pas de programme de vie plus beau que ça ! Tout est axé sur l’amour. C’est l’amour pleinement assumé. Au départ, je n’aimais pas ce moment où Jésus est crucifié… mais j’ai compris finalement qu’il le fallait. Il y a un lien intime entre le sacrifice et l’avènement du Christ. Celui qui détient la vérité, on va Le détruire, et Il revient encore plus fort.

  • Le martyre a quelque chose de terrifiant quand même … 

Dans le film « Des hommes et des dieux », on voit les moines se préparer à cette échéance. Au départ, ils sont divisés. Finalement, ils acceptent tous. Pendant le tournage, il est arrivé que le metteur en scène pleure. Il disait que ce moment était trop fort. Il laissait la caméra se promener librement sur nos visages et nous permettait de réagir librement. Certains pleuraient, comme Jacques Herlin qui jouait le Frère Amédée.

  • Jouer le rôle du Frère Luc, ce devait être impressionnant ?

On dit : l’habit ne fait pas le moine, mais si en fait ! Dès que les acteurs enfilaient l’habit monastique, ils changeaient. Ils devenaient sérieux, ils étaient différents. Jouer le Frère Luc au cinéma, cela a été pour moi un moment délicieux. J’avais à peu près le même âge que lui au moment du tournage. C’était un rôle sur mesure. Pour faire comprendre le sens de sa vie religieuse, on m’a laissé plusieurs fois sortir du texte. J’ai improvisé une tirade sur l’amour avec une petite Algérienne pour lui expliquer le sens de sa consécration. « J’ai eu trois amours dans ma vie… Mais, finalement, c’est un amour plus grand que les autres qui a pris le dessus. »

  • Cette ombre de la mort qui plane sur le film n’est-elle pas oppressante et contraire à l’amour ?

Non. « Il n’y a pas de plus grand amour que de donner sa vie pour ceux qu’on aime », comme dit Jésus dans l’Évangile. Le Frère Luc a vécu presque cinquante ans en Algérie. Il a fait son service militaire près d’un grand jardin. Un jour, trois personnes sont venues avec l’intention de le tuer. Le jardinier musulman, responsable du lieu, a pris sa défense. Il s’est interposé en disant qu’il ne fallait pas toucher un homme de Dieu. Résultat ? On a tué le jardinier une semaine plus tard… Ce drame a marqué profondément le Frère Luc.

  • La mort semée par les islamistes, est-ce un danger terrible pour l’Occident ?

Demain en France, les musulmans ne vont pas se mettre à courir après les chrétiens pour les tuer ! Cela dit, pour dire les choses comme je les pense, nous assistons à la fin de notre civilisation. Ce qui s’est passé en Égypte, et ensuite en Grèce, risque de se reproduire chez nous. Les Romains ont envahi la moitié du monde et puis, tout d’un coup, ils sont tombés. Cela peut nous arriver.

  • La vie de l’Église en France vous paraît-elle à bout de souffle ?

Pas du tout ! Beaucoup de jeunes participent à des rassemblements formidables. J’ai vu tout cela commencer avec le Renouveau charismatique à Paray-le-Monial. C’est Dominique Rey [le futur évêque de Toulon, Ndlr] qui m’avait embarqué là-dedans. J’étais émerveillé. J’ai trouvé ça vivant et vrai.

  • Comme le pape François qui fait votre admiration malgré les critiques qu’il endure ?

François met en premier le pauvre et c’est ça qui me touche ! Nous avons une série de papes formidables depuis Pie XII. Il y aura toujours des gens pour mettre le bazar dans l’Église. La division. Mais il ne faut pas les suivre. C’est impossible d’opposer les papes, surtout François et Benoît XVI.

 



PLUME ET FOI – SPÉCIAL MICHAEL LONSDALE

Chers visiteurs, voici notre sélection, le dernier livre de Michael Lonsdale,

« Luc mon frère »

« Le tournage du film Des hommes et des dieux a été une étape très importante de ma vie parce qu’il m’a permis de rencontrer la figure du Frère Luc, de Tibhirine. Ses compagnons du monastère et lui ont été enlevés puis tués en 1996 par un commando armé dont l’identité reste encore inconnue aujourd’hui.

Ces moines étaient pourtant bien intégrés en Algérie, ils parlaient l’arabe, aidaient les habitants alentour. Frère Luc, qui était médecin, les a soignés gratuitement, pendant cinquante ans, de 7 heures du matin à 10 heures du soir, s’occupant de tout le monde, même des terroristes. Aux critiques, il répondait : «Moi, c’est ce qu’il y a derrière le costume qui m’intéresse

Il incarne mon idéal : ne plus s’occuper de soi, constamment se dédier aux autres. Sa vie exemplaire illustre parfaitement cette phrase du Christ : «Il n’y a pas de plus grand amour que de donner sa vie à ceux qu’on aime.» Dans ce film, je n’ai pas eu l’impression de jouer : j’ai vécu. Luc était là, tout le temps, il m’a prêté son esprit, il guidait mes paroles. Ce saint homme – qui écoutait Édith Piaf, lisait L’Équipe tous les soirs et avait beaucoup d’humour – aimait les Algériens. En refusant de quitter le monastère, il est allé jusqu’au sacrifice. Il est toujours présent dans ma prière, c’est un modèle pour moi. J’ose même le considérer comme mon meilleur ami ». Michael Lonsdale

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 « Je ne pense pas que la violence puisse extirper la violence. Nous ne pouvons exister comme hommes que si nous nous faisons image de l’amour tel qu’il s’est manifesté dans le Christ, qui, JUSTE, a voulu subir le sort de l’injuste. » « … tant qu’il reste un peu de jours, je me dois aux autres, aussi, je ne peux quitter Tibhirine, comme le disait Edith Piaf ‘JE NE REGRETTE RIEN!‘ » (Frère Luc)