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DIEU OU L’ARGENT

Chers visiteurs, aujourd’hui, nous soumettons à votre analyse cet éditorial de paru sur le site LA NEF

ÉDITORIAL

Quoi qu’il en soit de l’avenir du mouvement, les manifestations des Gilets jaunes resteront un moment clé de la vie politique française. Je ne sais si le gouvernement parviendra finalement à amadouer ce mouvement ou à le marginaliser. Ce qui est sûr, c’est que les mesures ponctuelles annoncées par le président Macron pourront peut-être désamorcer la colère de certains, mais ne résoudront en rien le problème de fond soulevé par cet immense cri de détresse venu des entrailles du pays. Car ce qui est en jeu ici dépasse de beaucoup la hausse de telle ou telle taxe. Au reste, la France croule sous une telle complexité et un tel poids administratif et fiscal – nous sommes même devenus les champions du monde des prélèvements obligatoires ! –, que la baisse ponctuelle d’un impôt, si bienvenu soit-il, ne changera pas fondamentalement la situation. C’est tout le système qui serait à réformer – selon trois critères : simplicité, efficacité, justice – et cela semble une œuvre quasiment insurmontable, tant elle nécessiterait une volonté politique inexistante aujourd’hui et un soutien populaire ardu à obtenir… quand il s’agit d’exiger des sacrifices.

Un enjeu civilisationnel

Ce qui est en jeu, disais-je, dépasse ces aspects financiers, si importants soient-ils par ailleurs. En effet, les Gilets jaunes ne sont-ils pas un symptôme de la crise profonde que traverse notre civilisation, et d’abord de cet écart qui n’a cessé de se creuser depuis plusieurs décennies entre ce que Christophe Guilluy a appelé la « France périphérique » et la « France d’en haut » ? Cet écart se traduit certes par le déclassement économique et social de cette France encore enracinée, périurbaine, provinciale et rurale, représentant quand même près de 60 % de la population, qui ne bénéficie pas des avantages de la mondialisation, tandis que les habitants des grandes villes, à l’aise dans toutes les capitales du monde, en profitent largement. Mais au-delà de ce déclassement bien réel corroboré par les chiffres (1), il y a ce que l’on pourrait appeler un « déclassement civilisationnel » qui touche plus particulièrement cette frange déjà fragilisée de la population.

Il consiste principalement au lent démantèlement de la nation, cercle le plus large de la vie en société telle qu’elle s’est pratiquée en Occident, cadre de l’avènement de la démocratie et d’une histoire commune faite de grandeurs et de misères, les premières l’emportant cependant jusqu’à peu dans la conscience collective nationale. Or, aujourd’hui, nos élites hors sol cultivent la haine d’un passé jugé obscurantiste – le politiquement correct imposant cette vision totalement négative – et militent sans nuance pour le multiculturalisme, l’ouverture des frontières, sans mesurer l’impact d’une immigration massive majoritairement musulmane dont elles savent se protéger, laissant les Français plus modestes en première ligne : ainsi ces derniers ont-ils le sentiment d’être non seulement socialement rétrogradés, mais devenus des étrangers dans leur propre pays, sans que leur sort suscite quelque compassion, laquelle est entièrement réservée aux « migrants » !

Et ce démantèlement de la nation, sous les coups de boutoir d’une mondialisation plus ou moins dirigée par la finance et quelques gigantesques multinationales, est aggravé par l’Union européenne, insensible au désarroi des peuples demeurés attachés au cadre national et qui a perdu tout sens de son intérêt le plus vital. À cette décomposition des patries charnelles s’ajoute une déconstruction anthropologique sans précédent – avec le genre, on ne sait plus ce que sont un homme et une femme – qui contribue à la perte des repères traditionnels et au déracinement généralisé.

L’oubli de Dieu

À propos des Gilets jaunes, Mgr Michel Auptetit a écrit : « La conscience de Dieu le Père qui nous apprend à nous “aimer les uns les autres” a façonné l’âme de la France. L’oubli de Dieu nous laisse déboussolés et enfermés dans l’individualisme et le chacun pour soi » (2). L’archevêque de Paris a eu le courage de nommer ce qui est finalement le problème principal : l’oubli de Dieu !

La « financiarisation » de l’économie dans les années 1990 avec la mondialisation qui l’a accompagnée a entraîné comme un changement de paradigme : désormais ne compte plus que la rentabilité financière des grandes entreprises, tout lui étant subordonné, à commencer par les hommes, simples paramètres interchangeables d’ajustement. Ainsi, les choses apparaissent plus clairement : on peut dire, en simplifiant, que l’ancien monde servait Dieu plus ou moins bien, alors que le monde postmoderne a résolument choisi de délaisser Dieu pour servir le dieu Argent, confirmant la parole du Christ : « Vous ne pouvez pas servir Dieu et l’Argent » (Mt 6, 24). Il faut choisir…

Christophe Geffroy

(1) Cf. Christophe Guilluy, No society. La fin de la classe moyenne occidentale, Flammarion, 2018, p. 52 et suivantes.
(2) Communiqué du 5 décembre 2018.



TERRE DE MISSION N° 68

Chers visiteurs,

Comme chaque semaine, nous vous proposons la dernière émission de Terre de Mission, diffusée sur

Au sommaire:

  • l’abbé Claude Barthe, vaticanologue, commente le dernier livre de l’universitaire Guillaume Cuchet,  “Comment notre monde a cessé d’être chrétien”.
  • Bernard Antony, président de l’AGRIF, qui évoque la permanence du communisme, cent ans après.
  • Christophe Geffroy, directeur de la revue “La Nef”, qui présente les derniers dossiers de sa revue, sur l’existence de Dieu et sur l’engagement des catholiques dans la cité.



LA FRANCE CATHOLIQUE – JEAN SEVILLA

Jean Sévillia est rédacteur en chef adjoint au Figaro Magazine et membre du conseil scientifique du Figaro Histoire. Essayiste et historien, ayant publié de nombreux succès de librairie. Interview à l’occasion de la sortie de son dernier ouvrage « La France catholique »

(Propos recueillis par Christophe Geffroy)

La Nef :– Alors que l’on dit le catholicisme en déclin en France, votre livre montre une religion qui n’est nullement moribonde. Qu’en est-il en réalité ?

Jean Sévillia :– S’agissant d’un état des lieux du catholicisme français, deux écueils sont à éviter. Le premier, qui consiste à regarder la réalité avec des lunettes roses, a caractérisé pendant trois ou quatre décennies le discours épiscopal et celui de la plus grande partie de la presse catholique qui ne voulait pas voir la réalité en face, à savoir que les fruits attendus des années postconciliaires n’ont pas été au rendez-vous../…

En sens inverse, tendance qui prévaut souvent chez les « tradis », certains croient vivre les derniers jours de l’Église de France, souvent en mythifiant le passé. C’est pour répondre à ces deux écueils que j’ai écrit ce livre…/…

La Nef:-D’où vient le renouveau que vous décrivez et quel rôle y ont joué les papes Jean-Paul II et Benoît XVI ? Et comment se situe François sur ce terrain ?

Jean Sévillia:-Mon enquête ne porte pas sur la papauté, mais sur l’Église de France…/…

La Nef:-Qu’est-ce qui vous a le plus marqué dans votre enquête ?

Jean Sévillia:-L’étonnant foisonnement de propositions dans tous les domaines. ../…

quelle variété et quelle richesse dans les différentes familles spirituelles catholiques, dans les mouvements et associations, dans les œuvres !

La Nef:- Quelles sont les principales faiblesses et forces du catholicisme français ?

Jean Sévillia:-Les faiblesses, dans le désordre : un corps épiscopal souvent trop prudent ; le manque de formation de trop de laïcs ; l’impécuniosité qui rend tout projet difficile ; l’hostilité politique et médiatique à l’égard de l’anthropologie chrétienne ; le danger de l’entre-soi,…/…

Au rang des atouts, des clivages internes beaucoup moins marqués qu’il y a trente ans ; de nouveaux intellectuels (la génération Bellamy) ; une jeunesse catholique très déterminée et prête à s’engager…/…

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http://lanef.net/2018/02/02/la-france-catholique/