Dimanche 23 décembre 2018
4ème dimanche de l’Avent
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(Homélie du père Charles André Sohier, prêtre ermite)
Saint Luc nous a finement brossé un merveilleux tableau d’annonciation. Il nous dit, dans le prologue de son évangile, avoir pris de bonnes informations, peut-être dans la famille de Jésus, peut-être même auprès de Marie qu’il nous décrit à deux reprises « retenant tous ces événements dans son cœur » (2, 19.51).
Le récit qu’il nous livre est tout entier composé à partir de réminiscences bibliques, comme la phrase sublime de l’annonciation à Sara et Abraham : « Y a-t-il rien de trop merveilleux pour le Seigneur ? » (Genèse 18, 14) ou le cri de joie d’Anne à la conception de Samuel : « Mon cœur exulte dans le Seigneur » (1 Samuel 2, 1). Comment l’évangéliste pouvait-il traduire en mots l’expérience unique de la Parole de Dieu faite chair et accueillie par Marie, sinon en puisant dans le vocabulaire et les images de l’Ancien Testament ?
Saint Luc met en parallèle deux annonces de naissance : celle de Jean Baptiste à Jérusalem et celle de Jésus à Nazareth ; la première dans le Temple prestigieux, la deuxième dans une bourgade perdue ; l’une à un prêtre qui n’y croit pas, l’autre à une jeune fille qui ouvre tout son être à Dieu et à la vie…
La phrase que la jeune fille de Nazareth prononce est l’une des plus belles qu’un être humain puisse adresser à Dieu. Permettez-moi de faire ressortir un facile point de grammaire du texte grec de l’évangile pour saisir toute la profondeur de la réponse de la Vierge. Lorsque saint Matthieu nous rapporte la prière du Notre Père, il dit par exemple : « Que ton règne vienne ! » Il emploie un impératif qui exprime un désir bien défini.
Marie ici utilise le même verbe grec γινομαι mais à la forme optative, qui exprime un souhait beaucoup plus subtil. Pleine de gentillesse, elle invite le Seigneur, s’il le désire, à entrer au cœur de sa vie et à laisser naître en elle le mystère qu’il vient de lui proposer par son messager. « Si tu le désires, alors, que ton projet prenne naissance en moi qu’il vive entièrement et qu’il habite au cœur de mon être. » Comme la petite esclave juive de la femme de Naaman, le général syrien qui dit simplement : « Ah! Si seulement mon maître s’adressait au prophète de Samarie! Il le délivrerait de sa lèpre… » (2 Rois 5, 3), Marie laisse avec simplicité passer par elle l’œuvre étonnante de Dieu.
Il est difficile de trouver plus beau modèle de l’Avent. Car l’ange de Dieu est envoyé à chacun de nous pour être le messager de la naissance de Dieu en tout homme. « Dieu engendre à tout moment son Fils en toi », écrivait le poète mystique allemand Angelus Silesius.
Chacun est appelé à recevoir en soi le germe de la vie divine, à devenir l’auberge de Dieu, la maison où la Parole divine prend chair.
Chacun peut être recouvert par la nuée de la Shekinah (*), de la Présence divine biblique, dans le sanctuaire de son cœur. Demandons à Marie de nous obtenir un peu de sa simplicité. Il suffit de dire vraiment « oui » pour que notre désert fleurisse et que notre stérilité devienne féconde.
(*) Terme hébreu qui désigne la « Présence » de Dieu au milieu de son peuple