Dimanche 04 mars 2018
(Homélie du père Charles André Sohier)
Le temple de Jérusalem, construit par Hérode le Grand à partir de 20 avant Jésus Christ, était une belle et vaste construction. Outre le sanctuaire et le Saint des Saints, il comportait deux grandes cours, celle des hommes et celle des femmes, ainsi qu’une immense esplanade : le parvis des païens. C’est là que beaucoup se rassemblaient pour traiter leurs affaires, écouter les docteurs de la Loi, acheter des animaux pour les sacrifices et changer de la monnaie. C’est dans ce brouhaha de souk oriental, que se place l’incident rapporté par saint Jean. Jésus, en colère, fouet en main, chasse les marchands du temple. « Ne faites pas de la maison de mon Père une maison de trafic », dit-il, en accomplissant ce geste prophétique. Je vous propose de méditer sur trois leçons de cet épisode.
L’attachement à l’argent
L’argent est nécessaire, mais il est aussi un piège. Quant s’instaure le primat de l’économique à l’échelle mondiale, on glisse inévitablement dans la spirale du chômage, de la violence et du mépris des droits essentiels de la personne humaine. Au temple de l’or et de l’argent, avec son cortège d’injustices et de misères, nous avons à substituer le temple de la justice, de l’amour désintéressé et du respect. Voilà pourquoi Jésus chasse les marchands du temple. Mais ne nous contentons pas d’appliquer cela aux autres. Convertissons-nous nous-mêmes sur ce sujet. La passion du pouvoir et de l’avoir se glisse partout, y compris dans notre propre cœur.
La maison de mon Père
Mais l’essentiel ne se trouve pas encore là. Écoutons longuement cette étrange expression que Jésus utilise pour parler du temple : « la maison de mon Père ». Quel secret, quelle plongée dans l’intimité de sa personne, se cachent sous ces formules. Il est chez lui dans ce Saint des Saints, ce sanctuaire tabou, où nul ne peut entrer, sauf le Grand Prêtre, une fois par an. Ce lieu intouchable, séparé de tout, Jésus dit tout simplement que c’est la « maison de son Père », et sa propre maison de fils. Oui, ce qui est premier dans le culte que nous rendons à Dieu, ce ne sont pas les gestes (bœufs, brebis ou colombes), mais la confiance filiale que nous y mettons.
Le sanctuaire de son corps
Nous arrivons, avec cette phrase, au cœur de cette page d’évangile. C’est son corps, ce corps qui sera crucifié et ressuscité, qui est le nouveau temple. Ainsi, le lieu de la Présence de Dieu, n’est plus un édifice, c’est Quelqu’un ! C’est le Corps du Christ. Toute la liturgie chrétienne tourne autour de cette mystique du Corps du Christ.
Mais comprenons jusqu’où va ce mystère ! « Ne savez-vous pas que vous êtes le Temple de Dieu et que l’Esprit de Dieu habite en vous ? », dit saint Paul aux Corinthiens. Ainsi, ce n’est pas seulement le corps ressuscité de Jésus qui est le nouveau temple, mais le corps de chaque baptisé. En recevant le corps de Jésus, je deviens son corps qui est un sanctuaire. Voilà jusqu’où se fonde l’éminente dignité de l’homme.