Archives par mot-clé : Kérit.be



HOMÉLIE DOMINICALE

Dimanche 23 Avril 2017

DEUXIÈME DIMANCHE DE PÂQUES

« Voir et Croire »

Par le père Charles-André Sohier, Prêtre ermite et Webmaster de http://kerit.be/

Ces deux mots sont souvent associés dans l’évangile de Jean. Et c’est vrai pour le passage d’évangile que nous venons de lire. « Heureux ceux qui croiront sans avoir vu », dit Jésus ressuscité à Thomas. Certes les apôtres, puis thomas, huit jours plus tard, ont vu Jésus dans son corps marqué par la passion. Ils ont cru, assurément, ensuite; ils « furent remplis de joie», nous dit l’évangile.

Ce qui semble donc caractériser tous les récits d’apparition : c’est qu’on voit mais qu’il faut croire aussi, deuxième étape en somme – croire est plus que voir. Jean arrive au tombeau, le matin : « il vit et il crut », dit l’Evangile ; non pas : il vit, il constata, d’une évidence scientifique en somme, après laquelle il n’y aurait pas à faire ce saut en avant qu’est croire. Marie Madeleine, elle, « reconnaît » Jésus, après avoir vu quelqu’un mais confusément d’abord, pas encore reconnu donc, parce… qu’un mort ne peut être vivant bien sûr. Et c’est la même chose pour les disciples au soir de Pâques : ils « voient ses mains, son côté », après seulement vient l’envahissement de leur cœur : « ils sont remplis de joie » ; ils croient. Thomas enfin : il voit, il touche, et que lui dit Jésus ? Non pas : tu vois maintenant. Mais : « crois », « ne sois plus incrédule mais croyant ». Et le voici croyant quand il tombe aux pieds de Jésus clamant « Mon Seigneur et mon Dieu ». Il y a bien toujours deux étapes : voir, recevoir un témoignage direct, et croire, qui va bien jusqu’à Dieu même, hors de notre prise humaine ordinaire en tout cas.

Mais n’est-ce pas de nous qu’il s’agit dans ce fameux : « Heureux ceux qui croiront sans avoir vu » ? Sans avoir vu du tout, cette fois. Mais ce n’est pas tout à fait exact : la nouvelle de la résurrection du Christ nous est parvenu par le témoignage que nous avons lu ou entendu, par la tradition des écrits évangéliques, qui nous ont mis à l’écoute de l’enseignement des apôtres, une vie concrète dans la communion fraternelle, le repas eucharistique, la participation aux prières dont nous parlait le première lecture. Ce n’est donc pas tellement moins que ce qui a atteint les premiers disciples. Mais, comme eux, aussi, guère moins équipés qu’eux, nous sommes invités au grand dépassement, à la grande confiance, qu’est croire.

Et c’est cela que nous vivons tous les jours, en adorant, en priant, gardant en mémoire l’histoire évangélique, la passion et les semaines après la mort de Jésus, tout en restant ouverts à une rencontre dans la foi avec le Christ ressuscité. Oui, frères et sœurs, « nous tressaillons d’une Joie inexprimable qui nous transfigure » (2e lecture) parce que notre foi en Jésus, notre amour pour le Seigneur est une véritable rencontre qui nous est donnée et se laisse recevoir, une paix qui nous est communiquée et qui ne peut nous décevoir.

Et pourtant, il nous faut parfois être attristé, pour un peu de temps, par toutes sortes d’épreuves. La souffrance morale, la douleur physique ne nous sont pas épargnées et le présent peut se mêler au regret du passé et à l’angoisse pour l’avenir. Mais comme l’écrivait Olivier Clément dans un article : « l’espérance vient en nous quand notre désespoir ne se ferme pas sur lui-même mais se fait ouverture déchirante à Celui qui se crucifie avec nous pour nous ouvrir en Lui ; dans l’Esprit Saint, des voies de résurrection. » Dieu nous appelle à ce moment-là à nous dépasser et à nous décentrer totalement pour ne trouver qu’en Lui seul notre point d’appui et notre sécurité.

« La pierre qu’ont rejetée les bâtisseurs est devenue la pierre d’angle : c’est là l’œuvre du Seigneur, la merveille devant nos yeux » (psaume 117).