15e dimanche A
16 juillet 2017
(père Charles-André Sohier, prêtre ermite)
Jésus nous raconte aujourd’hui une histoire de semeur « tout terrain ». Puis, à la demande de ses disciples, il donne l’explication de l’histoire. Elle tient en quelques mots. Essentiellement : la semence, c’est la Parole de Dieu.
Donc, d’abord, Dieu nous parle. Pour beaucoup, c’est incroyable. Dieu est muet et, s’il existe, il ne se manifeste pas. Par contre, toute la Bible nous présente Dieu comme celui qui veut essentiellement communiquer avec nous. Il nous informe, il se fait connaître. Mais, bien plus, sa parole nous change, nous transforme, nous crée, nous construit.
Donc, Dieu parle. Comment ? « De multiples manières », dit l’épître aux Hébreux. Effectivement. Sa parole, c’est d’abord une parole sans mots. Au psaume 19 : « Les cieux racontent la gloire de Dieu, le firmament proclame l’œuvre de ses mains…pas besoin de récit ni de parole, nulle voix ne se fait entendre. » Toute la nature est parole de Dieu.
L’épître aux Hébreux continue en disant que Dieu, après nous avoir parlé à de multiples reprises par les prophètes, nous parle, en ces temps qui sont les derniers, par son Fils. Jésus est la Parole efficace, l’ultime Parole de Dieu. Il est la Parole qui a créé le monde, la Parole qui féconde cette terre, la Parole qui crée un peuple nouveau. C’est cette Parole qui vient d’ailleurs et qui produit en moi quelque chose de neuf. En face de cette Parole, le disciple doit prendre une attitude d’accueil.
Mais pour quel résultat ? Quand Jésus racontait la parabole du semeur, au bord du lac, les foules étaient encore nombreuses, nous dit l’Évangile. Mais il y avait déjà les ennemis, les méfiants, les sceptiques, « les sages et les savants » dont nous parlions la semaine dernière. Et les phénomènes de rejet vont aller croissants, si bien qu’à la fin, Jésus sera arrêté, condamné, mis à mort. Donc, de son temps, il y a eu ceux, de plus en plus rares, qui ont marché avec lui, et ceux, nombreux, qui l’ont refusé. Quand Matthieu écrit son Évangile, il s’adresse à des communautés judéo-chrétiennes qui sont en butte à l’hostilité de leurs compatriotes et à l’indifférence des populations païennes. Ces chrétiens, qui ont accueilli le message de l’Évangile, se demandent pourquoi cela n’avance pas plus vite, pourquoi ils restent si peu nombreux.
Nous nous posons les mêmes questions, en ce vingt-et-unième siècle. Pourquoi la « Parole du Royaume », semée à profusion, ne produit-elle pas de fruits plus abondants ? A la question des disciples – ceux du premier siècle et ceux d’aujourd’hui – Jésus répond justement, qu’il ne faut pas s’en étonner. Voilà bien un message d’espérance, pour tous les disciples de tous les temps. Au temps de Jésus, ils avaient espéré que l’avènement du royaume serait une intervention de Dieu subite, pour un jugement, c’est-à-dire pour tout remettre en ordre, pour rétablir la justice.
Et voici que Jésus nous dit : « Le Royaume est arrivé, il est là, au milieu de vous ». Vous n’y avez rien vu, mais il est commencé, inauguré avec la plus grande discrétion, et pourtant, il ne cessera jamais de croître, comme une petite graine. Message d’espérance. Les chrétiens sont là, porteurs de la Parole qui ne passera jamais. Petit peuple en regard de l’immense foule des hommes, et nous ne sommes pas toujours un terrain de très bonne qualité. Mais sans prétendre à la fertilité maximum, une seule chose compte : le désir, l’ouverture, l’accueil de cette Parole que le Christ sème en nous.
Confiance : « La pluie et la neige qui descendent des cieux n’y retournent pas sans avoir fécondé la terre, de même la Parole de Dieu ne lui reviendra pas sans résultat ». Dire : « Tout va mal », ce n’est pas évangélique. Dire « tout va bien », non plus. Avant tout, il faut savoir qu’il y aura toujours des durs, des inattentifs, des inconstants, mais aussi des hommes de bonne volonté « qui accueillent la Parole de Dieu et qui la gardent. »